Les déplacements domicile-travail post-confinement : l’alternative vélo en action

Les déplacements domicile-travail post-confinement : l’alternative vélo en action

La date du 11 mai ayant été annoncée par Emmanuel Macron pour un déconfinement progressif, les salariés et les entreprises se posent la question de la reprise progressive des déplacements domicile-travail lorsque le télétravail n’est pas une option.  Les témoignages quant à l’inquiétude des trajets quotidiens en période de Covid-19 sont d’ores-et-déjà palpables : face à cela, l’alternative vélo, considérée comme la plus hygiénique pour assurer la distanciation sociale, se présente, dans de nombreuses mégapoles, comme une solution à fort potentiel.

Benchmark des alternatives vélo dans le monde

De nombreuses villes ont déjà fait preuve de réactivité pour imaginer des solutions alternatives aux transports en commun, afin d’aider à faire baisser la densification et l’agglomérat des populations. Des infrastructures temporaires destinées aux cyclistes ont alors, dans l’urgence, vu le jour : ces solutions temporaires appelées « aménagements tactiques » ou « urbanisme tactique » sont de puissants leviers à déployer dans l’espace public pour rendre possible l’usage du vélo.

Bogota (Colombie) et Mexico (Mexique), plus d’une centaine de kilomètres cyclables temporaires déployés[1]

Dès la mi-mars, la ville a mis en place 22 kilomètres de pistes cyclables en une nuit. Par la suite, elles ont été étendues à 117 kilomètres, temporaires, dans toute la ville. Ces installations, à l’aide de plots de signalisation, ne sont initialement qu’appliquées les dimanches, et démontables facilement. Le Mexique a suivi le modèle colombien dans sa propre capitale.

New York City (Etats-Unis), des voiries piétonnisées[2]

La ville, parmi les principaux foyers épidémiques des Etats-Unis, a condamné l’accès aux voitures, par le biais de barrières, à certains axes automobiles majeurs. Ces voiries, très élargies par rapport aux trottoirs habituels, sont alors empruntées par les piétons et les cyclistes, afin de réaliser leurs déplacements dérogatoires en respectant au mieux les distances barrières. Ces délimitations de modes correspondent à 0,3% des kilomètres de voiries new-yorkaises.

Berlin (Allemagne), l’élargissement des pistes cyclables pour respecter les distances barrières[3]

Dans la poursuite de la logique des modes actifs, Berlin, réputée pour le développement des infrastructures vélo, a élargi nombre de ses pistes cyclables d’un mètre, afin de permettre aux cyclistes de maintenir leurs distances. Cet élargissement mord sur la voirie destinée aux automobiles et la délimitation est notable grâce à une signalisation jaune sur les routes. Pour ancrer la démarche, Berlin (Berlin.de) a publié un dossier de recommandations pour la création et l’extension temporaire des infrastructures cyclables, accessible à tous. Il y est préconisé comment dépasser sur la voirie automobile, comment assurer les croisements piétons et de combien élargir les voies cyclables.

De nombreuses autres villes, actrices de ces initiatives, peuvent encore être citées : Manitoba (Canada), Glasgow (Écosse), Londres (Angleterre), entre autres.

Les acteurs-clefs pour mettre en place les alternatives

Les élus des collectivités sont les principaux acteurs pouvant œuvrer à la promotion du vélo, pour ceux qui peuvent s’y reporter et impulser les changements « tactiques » à mettre en place immédiatement. L’ancien vice-président chargé des transports de la région Ile-de-France, Pierre Serne, actuellement administrateur d’Ile-de-France Mobilités et président du Club des villes et territoires cyclables, s’est vu confier la coordination de la mise en place de solutions de déplacement vélo[4]. C’est un mode qui avait déjà eu son succès, pour les trajets courts le permettant, lors des grèves de décembre 2019 et janvier 2020 dans la capitale.

L’autorité investie du pouvoir de police, ensuite, possède le pouvoir d’instaurer un changement d’exploitation des voiries, par la prise d’un arrêté de circulation. Une telle modification de l’usage des voiries ne fait preuve d’aucune opposition juridique, et s’avère donc une mesure facilement applicable et nécessaire afin d’accompagner les engagements politiques en termes de mobilités alternatives post-confinement.

Les exploitants de bornes de vélos en libre service ainsi que les entreprises de free-floating, avec une politique accommodante pendant la période de déconfinement, peuvent être acteurs d’une mise à disposition élargie de flottes de vélo, afin de garantir ce mode à un nombre d’usagers accru. Les magasins de vente ou de réparation de vélo sont également en première ligne pour aider à remettre en selle les voyageurs[5].

Les entreprises ont elles aussi un rôle à jouer pour faciliter la mise en œuvre des solutions-vélo auprès de leurs salariés : de nombreux dispositifs existent . Les Plans de Mobilité sont un bon outil à disposition des entreprises pour déterminer le potentiel d’utilisateurs du vélo et définir les mesures opérationnelles à mettre en place pour assurer un déploiement concret : actions de sensibilisation, facilitation de l’accès vélo au site de l’entreprise via des systèmes de sécurisation du stationnement, financement de trajets en vélo, installation de matériel à disposition des cyclistes (casiers, douches, abris). Autant de mesures qui devraient être amenées à se développer grâce à  la Loi d’Orientation des Mobilités qui étend les outils à disposition des des entreprises et créé le forfait mobilité durable, pour  accompagner financièrement le report modal sur le vélo, entre autres.

Un potentiel de report modal important en France

Les mesures de confinement ont entrainé une baisse considérable du trafic individuel motorisé dans toutes les agglomérations françaises, allant de 60 à 90%[6]. La possibilité d’un nouveau partage de la voirie entre modes actifs et véhicules est donc envisageable. Certaines métropoles et régions françaises ont déjà initié le mouvement. En Ile-de-France, il serait possible selon la présidente du conseil régional Valérie Pécresse « de passer de 400 000 à 800 000 » personnes journalières à vélo, et un travail d’imagination de 9 lignes cyclables « avec le RER-vélo » est en cours. La multiplication des pistes cyclables afin de favoriser les déplacements domicile-travail a déjà été opéré à Paris, et d’autres villes telles que Lyon, Grenoble, Montpellier ou Rennes prévoient déjà l’aménagement de nouvelles voies cyclables ou d’accélérer leurs plans vélo[7].

Le Cerema liste d’ores-et-déjà des options pour adapter la voirie au partage entre les modes actifs et la voiture, afin de sécuriser au mieux les cyclistes, la réduction automobile ayant entraîné, une augmentation des vitesses de circulation. La réduction des voies motorisées de plusieurs files à deux files uniquement, afin de laisser de l’espace disponible pour des voies cyclables, peut être opérée. Des modifications des plans de circulation (changer des voies double sens en sens unique, détourner des itinéraires de circulation) peuvent être à prévoir afin, là encore, de garantir une circulation sécurisée à vélo. Enfin, l’usage de la signalisation temporaire (plots, peinture jaune sur les voiries, etc.) faciliterait la circulation de chacun.

Depuis plus de 15 ans, nous aidons les collectivités et les Entreprises à concevoir et mettre en place des solutions de mobilité ou dé-mobilité opérationnelles : nous sommes à votre disposition pour partager nos retours d’expérience – Vous pouvez nous contacter via le formulaire de contact ou par mail : stephane.demolombe@ratpdev.com


[1] Alternatives économiques, avril 2020. URL : https://blogs.alternatives-economiques.fr/chassignet/2020/04/13/ideespourapres-oser-l-urbanisme-tactique-pour-adapter-nos-villes-au-contexte-post-covid19

[2] Les échos, mars 2020. URL : https://www.lesechos.fr/monde/enjeux-internationaux/pistes-cyclables-temporaires-bannissement-des-voitures-les-grandes-villes-sadaptent-au-coronavirus-1190262?fbclid=IwAR1Np99G5r99bsD1k5dg0PBoRMvlePQnRp-D-EB_D02uvkme1wzAZHyBz2I

[3] Berlin Unterwegs, avril 2020. URL : https://drive.google.com/file/d/143RtaEaLSDVISmPCP2607ms1QPH3cJHn/view

[4] Le Parisien, avril 2020. URL : http://www.leparisien.fr/amp/info-paris-ile-de-france-oise/transports/ile-de-france-le-velo-piste-ideale-pour-les-deplacements-post-confinement-13-04-2020-8299014.php

[5] Cerema, avril 2020. URL : https://www.cerema.fr/fr/actualites/amenagements-cyclables-temporaires-confinement-quelles

[6] Cerema, avril 2020. URL : https://www.cerema.fr/fr/actualites/amenagements-cyclables-temporaires-confinement-quelles

[7] La Croix, avril 2020. URL : https://www.la-croix.com/France/deconfinement-tous-velo-2020-04-18-1301090030